Bonsoir la grande famille !
Cette semaine, nous sommes en marathon d'infectiologie et plus ancré dans le palu depuis deux jours maintenant.
C'est dans ce cadre que j'ai pensé à nous parler (rappeler pour nombreux) du palu grave.
Moi, je suis Kevy Evan Nguya, étudiant en D1-MÉDECINE à l'Université Kongo.
Voici mon plan:
- Définition
- Formes
- Physiopathologie
- Diagnostic
- Prise en charge
En guise de rappel, le paludisme est une érythrose due à l'infection par un apicomplexe, le plasmodium. Il en existe près de 140 espèces dont 7 sont reconnuesus être responsables de cette infection chez l'homme: le falciparum, le knowlesi, le vivax, le malariae, l'ovale, le cynomolgi, et le brasilianum.
Ce parasite (protozoaire) est transmis par l'anophèle (la femelle parce qu'elle est hématophage, recherche le sang pour la maturation de ses œufs et passivement contracte le palu qu'elle transmet).
Le cycle a deux phases:
- la phase intravectorielle (dans le moustique), c'est le développement des formes sexuées du parasite; et
- la phase intrahumaine (dans l'homme, c'est le développement des formes asexuées du parasite).
En effet, lors du repas sanguin, le moustique prélève aussi les gamétocytes. Ces derniers dans l'estomac du moustique subissent une différenciation soit dans le sens d'une exflagellation (produisant 8 microgamètes mâles à partir d'un seul gamétocyte) soit par la perte du corps chromatinien (c'est le gamète femelle dès lors, de taille équivalente au gamétocyte soit un macrogamète en comparaison aux gamètes mâles).
Ces gamètes connaîtront la fécondation et le zygote formé est appelé okynète (œuf). L'okynète va franchir la membrane pellucide de l'estomac du moustique et gagner la circulation du moustique où deviendra oocyste.
L'oocyste va subir une maturation en sporozoïtes dans les glandes salivaires du moustique. Et, lors du prochain repas sanguin, les sporozoïtes seront libérés passivement pendant que le moustique cherchera à anesthésier l'hôte humain.
Dans l'organisme humain, les sporozoïtes vont migrer rapidement dans la direction du foie via le flux sanguin, c'est là qu'ils deviennent mérozoïtes et évolueront et se multiplieront au sein des cellules épithéliales du foie dont ils se munissent de la membrane leur permettant d'échapper aux cellules de Kupffer (macrophages du foie). C'est alors en éclatant qu'ils vont infiltrer le sang et arriver au stade de trophozoïte, puis de schizonte érythrocytaire et lors de l'éclatement du globule rouge, les shizontes seront des formes pré-sexuées: les gamétocytes...ainsi de suite.
[Vous pouvez retrouver ici le résumé du paludisme de l'an passé avec les différents commentaires:
Pénétration érythrocytaire |
I. DÉFINITION :
Infection plasmodiale avec atteinte oui dysfonctionnement d'un -organe important-, due au P. falciparum, P. knowlesi et P. Vivax.
II. FORMES DE PALU GRAVE
On en distingue 3 formes d'après la dernière classification :
- forme neurologique (prédominance des signes neurologiques avec anémie > 5g/dl d'Hb);
- forme anémique (Anémie avec < 5g/d'Hb), à ne pas confondre avec le palu compliqué d'anémie (où Hb> 5g/dl); et
- forme respiratoire (Détresse respiratoire)
III. PHYSIOPATHOLOGIE DU PALUDISME GRAVE
2 hypothèses sont évoquées à ce jour:
• Hypothèse mécanique : c'est celle de l'adhésion entre Globules rouges et cellules endothéliales (des vaisseaux sanguins).
3 facteurs interviennent ici:
✓ les knobs et antigènes plasmodiaux:
1) Knobs: protrusions membranaires des GR parasités par le plasmodium suite à l'expression des antigènes plasmodiaux.
2) Antigènes plasmodiaux :
Molécules d'origine plasmodiale exerçant une activité sur les membranes des GR et adhérant à l'endothélium, responsables de l'adhésion à la paroi vasculaire.
Nous citons ici:
- les PFEMP (P.falciparum erythrocyte membran protein) 1, 2 & 3 (propres au Plasmodium falciparum). La PFEMP1 va au delà des protrusions membranaires (Knobs) pour établi un réel contact avec les récepteurs endothéliaux alors que les 2 & 3 vont rester en dessous de la membrane cellulaire.
- les HRP (Histidin rich protein) 1,2 & 3 et bien d'autres.
✓ les récepteurs endothéliaux : des molécules d'adhésion cellulaire pouvant être pour certaines d'entre elles activent des cellules qui entrent au contact de l'endothélium comme les plaquettes.
ICAM (intercellular adhesive molecular), VCAM (vascular cells adhesive molecular) , PECAM1 (Platelets-endothelial cells adhesive molecular, ce qui expliquerait la survenue de la CIVD par activation des plaquettes) , CSA (au niveau des villosités placentaires, c'est qui établit le lien entre palu et grossesse) ,CD36, Intégrines, sélectines...
✓ le rosetting et l'agglutination : le premier désigne l'adhésion entre Globules rouges non parasités et parasités, l'agglutination concerne uniquement les parasités.
Ces phénomènes, au niveau de la microcirculation (+++cerveau), aboutissent à l'obstruction des vaisseaux>>> hypoxie et troubles métaboliques des neurones>>> troubles neurologiques (coma, convulsions...).
• Hypothèse inflammatoire :
Parasitémie>> monocytes-macrophages stimulés>> stimulation du LTCD4, population TH2 (pour la réponse cellulaire parce que le microbe est intracellulaire)>> LTCD8, NK, orages cytokinique (IL-6, 12, TNF-ALPHA...).
Cette réaction de l'organisme doit être mesurée pour réussir cette lutte si elle est au-delà de la normale, il y aura amplification des effets du plasmodium parce qu'il faut déjà noter que les cytokines augmentent l'expression des récepteurs endothéliaux et donc augmentent le risque de CIVD, et permet au plasmodium de mieux se fixer.
L'œdème pulmonaire à la base de la détresse respiratoire se forme par vasodilatation des capillaires sanguins alvéolaires. Cette vasodilatation est due aux médiateurs de l'inflammation, et à l'échelle vasculaire, on peut avoir un choc.
L'Anémie est due à la destruction splénique des GR parasités et non parasités par rosetting.
Également, en cas d'hypoglycémie sévère, le GR meurent par anergie.
La conséquence de l'hémolyse est la libération de l'hémoglobine (Hb), de l'hémozoïne et du Potassium intra-érythrocytaire:
# HB>> foie (métabolisme en bilirubine>>> ictère aggravé par l'hypoglycémie) et rein (toxicité de l'Hb pour les cellules tubulaires>> nécrose tubulo-intersticielle>> IRA organique réversible + hémoglobinurie).
# HEMOZOINE (ou pigment malarique, provient de la dégradation de l'HB par les formes intra-érythrocytaires) >> hypothalamus (effet pyrogène, c'est ce qui explique que la fièvre est rythmée par la chute de la population erythrocytaire), et macrophages (effet immunosuppresseur>> par paralysie des monocytes et macrophages).
Anémie>> hypoxie>> exaltation de la voie d'EBDEN MEYEROFF>> lactacidémie>>> myalgie, courbatures, asthénie...
Hausse du métabolisme avec hyperglycémie>>> hypoglycémie>>> coma, aggravation de l'ictère, anémie, immunoparalysie, asthénie...
IV. DIAGNOSTIC
1) Tableau clinique du paludisme grave
• troubles de la conscience (y compris un coma aréactif) ;
• prostration, c’est-à-dire une faiblesse généralisée, de sorte que le patient est incapable de s’asseoir, de se tenir debout ou de marcher sans assistance ;
• convulsions répétées : plus de deux épisodes en 24 h ;
• respiration profonde et détresse respiratoire (respiration acidosique) ;
• lésion rénale aiguë ;
• œdème pulmonaire aigu et syndrome de détresse respiratoire aigu ;
• collapsus circulatoire ou choc, tension artérielle systolique < 80 mm Hg chez l’adulte et < 50 mm Hg chez l’enfant ;
• ictère clinique avec mise en évidence d’autres dysfonctionnements d’organes vitaux ; et
• anomalies hémorragiques.
2) Résultats de laboratoire et autres observations
• hypoglycémie (< 2,2 mmol/l ou < 40 mg/dl) ;
• acidose métabolique (bicarbonate plasmatique < 15 mmol/l) ;
• anémie normocytaire grave (hémoglobine < 5 g/dl, hématocrite < 15% chez l’enfant ; hémoglobine < 7g/dl, hématocrite < 20% chez l’adulte) ;
• hémoglobinurie ;
• hyperlactatémie (lactate > 5 mmol/l) ;
• insuffisance rénale (créatinine sérique > 265 μmol/l) ; et
• œdème pulmonaire (à la radiographie).
3) Diagnostic différentiel du palu grave :
- forme neurologique :
* Méningite bactérienne
* Tétanos
- forme anémique :
* Paludisme compliqué d'anémie non tolérée
- forme respiratoire :
* Covid-19
V. PRISE EN CHARGE
Ce sont les formes injectables, en monothérapie:
- ARTESUNATE IV 2,4 mg/Kg
- ARTEMETHER IV 3,6mg/Kg
- DICHLOROHYDRATE DE QUININE IV 10 mg/Kg
selon la chronologie H0-H12-H24 puis toutes les 24h soit relais par les combinaisons thérapeutiques à des dérivé d'artemissinine (CTA ou ACT) comme le palu simple.
Puis prise en charge des complications :
- diazépam si convulsions,
- transfusion du culot globulaire selon la baisse de l'Hb pour corriger l'anémie,
- la vit K pour pallier les troubles hémorragiques avec la perfusion du plasma frais.
Voilà le peu que je connais du palu grave. Et sur base de ça, nous pouvons construire.
Également, vos questions et rectifications sont les bienvenues.
Merci pour votre aimable attention. 🙏🏽
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Paludisme grave par Kevy Evan Nguya, samedi 24-07-2021
➡️Docteur Arche Nkoyi: Félicitations pour le travail 👌🏾🤝🏼... Ajouts
RépondreSupprimerPour l'Artéméther, la posologie: 3,2mg/kg en IM comme dose d'attaque suivis de 1,6mg/kg chaque jour jusqu'à ce que le patient puisse avaler.
Pour l'Artésunate: si moins de 20kg, donnez 3mg/kg.
➡️Dr Philo Socrate Kinamvuidi: Un petit réarrangement pour l'artesunate : de 1 à 20 kg: 3mg/kg, supérieur à 20kg:2,4mg/kg
➡️Docteur Arche Nkoyi: Neuropaludisme ou Accès pernicieux palustre ou paludisme cérébral selon les écoles se définie par:
- une altération profonde et durable de la conscience( Glasgow <9 chez adultes ou adolescents, Blantyre < à 2 chez les moins de 5ans): un coma calme avec hypotonie et aréflexie *sans autre cause apparente ni prise de sédatif ni hypoglycémie
- associé aux convulsions >2/24h chez l'enfant ou convulsions sans signes méningés ni focal chez l'adulte + notion de fièvre dans le 48h ou pas + G.E positive au p.falciparum;
- Autres signes comme au FO (fond d'œil) une rétinopathie palustre (4 stades).
Jadis la forme neurologique était utilisée en fonction de la brutalité ou de temps du fléchissement de l'état de conscience mais actuellement c'est abandonné, cette terminologie au profit du Neuropaludisme
Pour le Paludisme grave forme anémique, il se définit par:
- Une pâleur avec taux d'Hb <5g/dl ou Hct <15% si enfants <12ans ou Hb <7g/dl,Hct <20% si enfants >12ans associée à
- Une GE positive avec parasitémie >10.000/ul