dimanche 2 janvier 2022

Grossesse molaire

Bonsoir la grande famille !
Je suis Kevy Nguya, étudiant en Doc1 Sortant en fac de médecine à l'Université Kongo.
Je viens ce soir, comme annoncé hier, nous entretenir sur la GROSSESSE MOLAIRE.
Le sujet est très vaste, je préfère signaler d'ores et déjà. Je vais présenter les grandes lignes afin qu'à travers les interactions, nous élargissions les horizons.

Voici le plan:
- Introduction
- Définition des concepts
- Rappel sur l'embryologie (rôle des trophoblastes)
- Étiologies
- Clinique et complications
- Examens complémentaires
- Prise en charge

Introduction

Le placenta est un organe que partage la mère et le fœtus. Il permet à ce dernier de vivre aux dépens de la mère grâce à ses rôles respiratoire, métabolique (et nutritionnel), et endocrine. Et étant organe, aussi faillible que les autres, le placenta peut présenter des anomalies dont l'une sera développée aujourd'hui.

La grossesse molaire fait partie d'un ensemble nosologique dit "Maladie trophoblastique" dans lequel est retrouvé sa complication la plus redoutable, le choriocarcinome.
Villosités choriales sur une grossesse molaire


1Définition des concepts

🔸 Môle hydatique= grossesse molaire... Et même appelée par certains ‹Grossesse à blanc›.
Du grec mole (masse), hydatique (sac à eau), la grossesse molaire est littéralement une poche d'eau qui se forme au lieu du fœtus.
Sinon, la définition plutôt détaillée est la suivante :
La môle hydatiforme est une hyperplasie du trophoblaste, associée à une grossesse normale ou une grossesse môlaire. 
Elle est caractérisée par une dégénérescence kystique des villosités choriales et une élévation des hormones gonadotrophiques.

Catégories :

La môle hydatiforme peut être catégorisée en môle partielle et môle complète.

2. Étiologies

Les étiologies décrites à ce jour sont génétiques ou mieux, chromosomiques.
On pense aux mécanismes suivants:

✓Pour la môle complète (c'est-à-dire môle sans embryon), deux possibilités génétiques existent :
• ovule anucléé fécondé par deux spermatozoïdes >>> 46 chromosomes XX (tous paternels)
• ovule anucléé fécondé par un spermatozoïde qui connaîtra une parthénogenèse >>> 46 chromosomes XX tous paternels. Jamais de YY retrouvés parce que cette composition est incompatible à la vie cellulaire.

✓ Pour la môle incomplète ou partielle ou encore embryonnée (on y retrouve l'ébauche embryonnaire en plus de la môle), on décrit une fécondation d'un ovule nucléé par deux spermatozoïdes. La conséquence est un zygote de 69 chromosomes (triploïdie).



Le fœtus triploïde est malformé, complexe. Des malformations touchant du SNC à l'appareil digestif en passant par les systèmes cardiovasculaire et urinaire. Le fœtus est incompatible avec la vie.

3. Épidémiologie:

Il a été observé que la fréquence des disparités dans les régions du globe: 1 cas pour 2000 à 3000 grossesses dans les pays développés contre à 120-240 cas pour 2000 à 3000 grossesses en Afrique.
On incrimine à ce jour l'âge avancé (>40ans) et l'âge jeune (<17ans). L'âge du partenaire est un sujet de controverse.
Certains croisements de groupes sanguins comme A-O...
Les antécédents de môle, de grossesse gémellaire vitelline, la multiparité aussi. Et il est aussi à craindre la sexualité non régulée (infections virales? Progestatifs ?).

4. Clinique 

Constamment en clinique, on retrouve des métrorragies expliquées par une expansion des villosités choriales. J'expliquerais ça par le rôle des trophoblastes qui est l'invasion utérine à priori myométriale grâce aux enzymes lytiques (des métalloprotéases) qui sont en temps normal inhibées par des facteurs utérins et placentaires; mais dans le cas de cette prolifération, l'inhibition est insuffisante.

On retrouve des vomissements incoercibles (Hyperemesis gravidarum) parce les trophoblastes qui demeurent encore en activité et en qui plus est, sont en grand nombre, sécrètent plus d'HCG que nécessaire pour le maintien de la grossesse.

On retrouve l'exagération des signes sympathiques de la grossesse. (voir HCG)

On retrouvera aussi une HTA associée et une hyperthyroïdie. (Voir HCG)

On a également un gros utérus (faisant penser à une grossesse multiple, un polyhydramnios, une macrosomie, un kyste ovarien ou à un myome utérin).

Les complications sont liées à tout ce qui précède :
- amaigrissement,
- douleur mammaire
- dysgravidie éclamptogène
- thyrotoxicose
- choriocarcinome avec possibilité de métastases pulmonaires+++

5. Paraclinique

✓ Imagerie

• Échographie:
On a ici une masse opaque (hyperéchogène) sans formation fœtale en cas de môle complète et quelques fois en cas de môle incomplète d'où la difficulté diagnostique nécessitant un examen anatomopathologique.
Môle complète, zone hyperéchogène (très noire) au centre: sac vitellin


• Radiographie
- ASP: opacité ovoïte sans squelette fœtal
- Rx thorax : pour exclure un essaimage de métastases vers le thorax.

• Artériographie : utérus hypervascularisé avec un contenu quasi-avasculaire.

Biologie 
 
• Dosage du bêta-HCG
Presque toujours très élevée au-delà de 500 000 UI (Prof Elongi, Obstétrique, 2015). Sinon les taux peuvent être réduits en cas de môle inactive ou morte.

En période post-partale, si persistance de taux élevé de bêta-HCG après le sixième jour, on craint une maladie trophoblastique (Prof Mbangama, Obstétrique 2015).
 
• Anatomie pathologique

6. Prise en charge

Elle est unique: Évacuation utérine. Si échec de l'évacuation utérine ou transformation en choriocarcinome indiquer une hystérectomie préventive.

Le traitement des complications:
- On procède à un traitement des symptômes comme l'hyperemesis gravidarum.
- si cancérisation, on recourt à la chimiothérapie ;
- si HTA, on passe à la stadification et au traitement de la pré-éclampsie.

Mais déjà après l'évacuation utérine, il y a amendement des symptômes.
 
C'est ainsi que je clos cet exposé qui est encore très long en soi.
Merci de m'avoir suivi.
A vous le clavier!
C'est par ces mots que j'ouvre la séance des ajouts, questions et réponses, chers docteurs.


CAP KABA WhatsApp Forum, décembre 2021©





1 commentaire:

Kevy Nguya a dit…

➕ Docteur Ledoux Kayumba:
Nous remercions Dr Kevie de nous avoir réservé de son temps pour exposer ce sujet préoccupant.
Mes ajouts sont en rapport avec la PEC.

• Lorsqu'on prend en charge un cas de grossesse molaire, il ne faut jamais oublier la surveillance post-molaire qui est très importante. Cette surveillance est clinique (surveillance de l'involution utérine ) et paraclinique (le dosage de bêta-HCG), selon ce rythme:
- chaque semaine durant le premier mois ou jusqu'à la négativation,
- chaque 3 mois Durant la première année et chaque 6 mois durant la deuxième année
(protocole des Cliniques Universitaires de Kinshasa).
• On s'assurera de mettre la femme sous contraceptifs durant cette période en évitant le stérilet car l'utérus étant mou risque une perforation.

• Après évacuation utérine donner à la femme un RDV après deux semaines pour réaliser une échographie contrôle. Très important !!

➕DocteurJunior Mugalu:

• En guise de complication, on peut également avoir une thyrotoxicose suite à l’effet TSH-like de l'HCG (HCG : chaîne commune et homologue de structure que le TSH).

• En clinique, on aura aussi:

-Utérus plus gros que l’âge gestationnel,
- Utérus en accordéon de Jeanin (Hauteur utérine variable d’un examen à un autre).

- Métrorragies caractéristiques : importantes, spontanées, rouge, récidivante , capricieuses et d’abondance croissante.

• Un bon signe d'orientation à l’échographie est l’image en nid d’abeilles ou frais de grenouilles.

❓Docteur Jun Lass Obang

J'ai juste une question :

La dysgravidie eclamptogene survient cmt ds ce contexte ?

Réponse:

🔸Kevy Evan Nguya: Les mécanismes de cette maladie ne sont pas très bien élucidés, sinon je pense à la thyrotoxicose.
🔸Docteur Arche Nkoyi: Devant une môle toxique surtout au premier trimestre de la grossesse, il y a une vascularisation pauvre au niveau de la circulation fœto-maternelle due à une mauvaise invasion trophoblastique créant ainsi une hypoxie ischémique expliquant cette toxémie gravidique...
Lors de la placentation les vaisseaux maternels doivent subir deux invasions dans 2 périodes différentes pour faciliter la vasculogenèse de la circulation fœto-maternelle mais si cette invasion n'arrive pas à se faire comme il se doit, les vaisseaux vont garder leur résistance vasculaire face à plusieurs stimuli d'où l'HTA ou dysgravidie.

🔸Kevy Evan Nguya:
Je vais rejoindre la piste de Dr. Arche qui déjà nous a parlé de l'ischémie du fait d'un défaut de vascularisation utérine en cas de môle hydatiforme.
En cas d'ischémie utéro-placentaire, les produits de nécrose libérés sont de nature pathogène et parmi eux, nombreux radicaux libres. En entrant en contact avec l'endothélium vasculaire qu'ils activent, il entraînent la libération de l'endothéline, de la TXA2 et l'expression des récepteurs des plaquettes >>> vasoconstriction et embolie.
Les radicaux libres sont de nature vasoplégique mais ils détruisent les cellules endothéliales qui à leur tour, libèrent de l'endothéline, un puissant vasoconstricteur.

🔸Docteur Arche Nkoyi: Donc l'hypoxie entraîne un état de stress oxydatif au niveau du lit vasculaire maternel avec comme conséquence un dysfonctionnement endothélial source de la dysgravidie.