lundi 27 mars 2023

Aspergillose, vautour de la tuberculose

Nous parlerons dans les prochaines lignes de : “l’aspergillose, le vautour de la tuberculose” en d’autres termes l’aspergillome.


La présentation vous sera faite par Exaucée M. Nebula, étudiante en Doc2 à l'Université Kongo.

Voici comment se présente le plan:
0.Introduction 
1.Définitions 
2.Épidémiologie 
3.Physiopathologie 
4.Diagnostic 
5.Traitement


0. Introduction
Les poumons étant des organes essentiels à la vie, une fois altérés entraînent des troubles respiratoires. Sachons que les infections pulmonaires tuent des millions de personnes et affectent les personnes de tous les âges. L'Aspergillus fumigatus est un germe touchant les poumons, il est très répandu dans la nature (sol,atmosphère...) et chaque personne est quotidiennement exposée à des spores aspergillaires ce qui entraîne ledit sujet “l’aspergillose”. Le but de ce travail est de présenter notamment les caractéristiques cliniques, paracliniques et la prise en charge de cette infection pulmonaire très fréquente en raison de l’endémicité des maladies pulmonaires comme la tuberculose.

1. Définitions
Nous allons définir quelques concepts qui nous aideront à mieux comprendre notre sujet.
L’aspergillose : l’aspergillose est une infection causée par un champignon du genre Aspergillus, celle-ci survient principalement au niveau du poumon et essentiellement chez des personnes fragiles soit immunodéprimés par inhalation des spores de ce champignon.

• La tuberculose: est une maladie infectieuse due à une bactérie, le Mycobacterium tuberculosis soit bacille de Koch touchant plus les poumons et qui se transmet par la voie aérienne d’une personne à l’autre.

L’aspergillome : variété particulière d’une aspergillose pulmonaire; c’est une mycose due à la colonisation d’une cavité préformée démunie de défense locale, atteint donc des patients avec une maladie pulmonaire pré existante (tuberculose, sarcoïdose , abcès pulmonaire, bronchectasie ...).

Après ces définitions nous dirons quelques mots sur l’épidémio entre autres l’agent causal, habitat, mode de transmission, terrain favorisant...

2. Épidémiologie
Une aspergillose est une infection par un champignon du genre Aspergillus, il est saprophyte et cosmopolite, dans 80% des  cas elle est due à l’espèce A.fumigatus et d’autres souches peuvent également être à l’origine de l’aspergillose dont l’A.niger, A.nidulans, A.flavus, A.versicolor...

L’Aspergillus a pour habitat le sol, des matières organiques en décomposition...🌝
Et se transmet par inhalation des spores . 
Survient dans un terrain d’antécédent de tuberculose (Aspergillome), d’immunodépression ( SIDA, corticothérapie prolongée et récente, cancer, irradiation...)

Alors en rapport avec notre thème, nous allons plus nous baser sur l’aspergillome, expliquer comment se forment des cavernes tuberculeuses et comment le germe profite de ces restes lésionnels de la tuberculose.

3. Ethiopathogénie

A. Formation des cavernes tuberculeuses :

Une caverne est une cavité creusée au sein du parenchyme pulmonaire. Les cavernes sont une complication fréquente de la tuberculose, les bacilles tuberculeux se développent initialement dans les poumons sous forme de nodules appelés granulomes, qui sont peu à peu entourés de lymphocytes et de macrophages destinés à contenir l’infection. Ces granulomes évoluent soit sans cicatrice soit vers la caverne.

Les vestiges de macrophages détruits occupent le centre du granulome et forment la majeure partie de la nécrose caséeuse . Chez certains patients cette nécrose se liquéfie et devient un milieu adapté aux bacilles qui prolifèrent .

Des enzymes protéolytiques érodent alors la capsule fibreuse située en périphérie du granulome et son centre liquide peut alors se vider peu à peu en étant remplacé par de l’air venu des bronches. 
Lorsqu’une caverne tuberculeuse arrive en communication avec l’arbre bronchique, la dissémination des bacilles dans l’air expiré augmente la contagiosité.

Par ailleurs, la quantité importante de bacilles contenus dans les cavernes favorise le développement de résistances aux anti tuberculeux. Une fois la nécrose liquéfiée évacuée, la périphérie du granulome persiste autour d’un espace vide sensible aux infections et forme ainsi une caverne.

Comme le vautour se nourrit des animaux morts, après la formation des cavernes nous allons dire quelques mots sur la formation de l’aspergillome qui profite des lésions causées par la tuberculose...

B. La formation de l’aspergillome
Après inhalation, les spores vont s’adhérer au niveau de l’épithélium respiratoire, ceci mène à la formation d’un biofilm (c’est la 1ere étape).

Les spores en contact avec l’épithélium bronchique et les alvéoles pulmonaires produisent des enzymes, de la classe des protéases, qui dégradent les protéines des tissus voisins. L’élastine et le collagène y sont particulièrement sensibles .

Ce contact avec les spores entraîne alors une desquamation de l’épithélium et la libération des cytokines pro-inflammatoires. Les interleukines produites localement jouent un rôle dans la formation de l’aspergillome.

Certaines variations génétiques favorisent l’apparition des aspergillomes complexes, ainsi que le profil immunitaire génétique de l’hôte. La desquamation et l’inflammation qui en résultent diminuent l’efficacité de la barrière épithéliale, facilitant l’infection par Aspergillus.

On peut  distinguer plusieurs formes cliniques d’aspergillomes qui peuvent se combiner.

- simple: nous avons l’aspergillome sans évolution radiologique à 3 mois d’écart avec parfois une sérologie négative .
- complexe : fait de plusieurs cavités, favorisé par un terrain de TBC   avec des signes cliniques et une progression radiologique des lésions ;
- fibrose pulmonaire aspergillaire chronique: on voit au moins deux lobes pulmonaires détruits par un aspergillome complexe;

- nodule aspergillaire : où l’aspergillome n’est pas développé au sein d’une cavité mais au milieu du parenchyme sain ;

- aspergillose invasive subaiguë: chez les patients immunodéprimés où une aspergillose évolue quelques mois et crée des cavités et des nodules .
Aspergillose au scanner


4. Diagnostic 
Le diagnostic de différentes formes d’aspergillose repose sur un faisceau d’arguments: dont nous avons l’épidémiologie, la clinique, la biologie et l’imagerie médicale, elles ont toutes leur importance, en outre le terrain sur lequel survient l’infection.

A. Clinique: l’infection est asymptomatique de découverte fortuite, on recherchera l’antécédent de la tuberculose ;
On observe des manifestations cliniques comme l’hemoptysie d’intensité variable (+de 26% des décès ) 
Plus rarement nous avons les signes respiratoires dont la toux, dyspnée...

Aspergillome du sinus maxillaire >>>sinusite chronique

B. Paraclinique :

Le scanner est l’examen de première intention grâce à sa meilleure visualisation: image en grelot .

• Radiothorax :on voit des opacités rondes qui sont parfois surmontées par un croissant gazeux ;
• TDM: visualise le signe du halo 

Aspergillome



• Biologie: mycologie (culture sur milieu de sabouraud); immunologie (PCR, Sérologie/antigénémie aspergillaire);

Têtes d'aspergillus


• Anapath: Permet de mettre en évidence un agent fongique dans un liquide de lavage broncho-alvéolaire.

On voit des filaments mycéliens septés et ramifiés, on distingue nombreuses têtes aspergillaires et une inflammation nécrosante et purulente.
Nous chutons au tout dernier point . 

5. Traitement
Le traitement dépend des manifestations cliniques, du terrain, de la suspicion d’une lésion cancéreuse.

T3 médical
- Itraconazole (molécule de 1ère intention);
- Voriconazole,
- Posaconazole 
- Amphotéricine B 

L’arrêt du traitement peut aggraver des symptômes.

T3 chirurgical
La chirurgie est un des traitements curatifs de l’aspergillome si les conditions de l’état général sont satisfaisantes.

Elle vise à retirer l’ensemble des lésions d’aspergillome.

Pour l’aspergillome simple, on fera une résection de nodules et pour l’A.complexe, on procèdera à la lobectomie ou pneumonectomie .

NB: 
- Pour l’aspegillome simple, la chirurgie peut se faire en première intention en raison du faible taux de complications de la guérison qui s’en suit .
- La durée du traitement dépend de la forme de l’aspergillome .

Merci de m’avoir suivie .😌 
Vos remarques,ajouts et questions sont les bienvenus ! 🙏

CAP KABA WHATSAPP FORUM © Mars 2023
Séminaire des infections respiratoires : Aspergillose, le vautour de la tuberculose par  Exaucée Mafuta Nebula.

2 commentaires:

Kaba Forum Online a dit…

➕Blaise Longo: Un très petit ajout. Cette infiltration de la caverne observée à la RX donne l'image radiologique classique dite << en grelot>>

➕Kevy Evan Nguya
•Dans la physiopathologie:
Si la TB ou la sarcoïdose ou encore autre destructeur du parenchyme pulmonaire venait à éroder la paroi en creusant une caverne, l'aspergillus lui, transforme ça aussi en canal. C'est-à-dire qu'à cause de l'aspergillus, on peut aboutir à une communication pleuropulmonaire (pneumothorax) ou pneumobronchique.
=> pour les plus curieux, il s'agit là d'un pneumothorax spontané secondaire.
Du côté pneumobronchique, il se constituera alors la voie par laquelle les champignons se déverseront dans les voies aériennes>> mobilisation et expulsion à la respiration et à la toux>>> contagion.

• Dans la paraclinique,
On souligne un certain nombre de problèmes:
- les mycoses opportunistes à l'instar de l'aspergillose et de la cryptococcose sont souvent retrouvées dans l'air ambiant. Ça fait que leur présence dans l'échantillon n'est pas toujours synonyme d'infection...😅 Donc un joli poisson d'avril si vous le faites le 01er avril et que le résultat est trompeur.
- une autre chose, c'est que leur virulence est telle qu'il suffit d'une petite charge mycosique pour avoir de grands dégâts... Cela fait que même asymptomatiquement, on peut avoir une évolution rapide.
- in fine, la prise d'antifongique peut fausser le diagnostic.
Pour pallier alors aux problèmes soulever: une bonne anamnèse et un bon examen clinique associés à une paraclinique montrant des évidences surtout sérologiques.

•Dans le traitement,
L'Aspergillus fumigatus est résistant à l'amphotéricine B depuis un moment. On pense aujourd'hui à un effet qui serait dose-dépendant.
On l'utilise encore chez nous mais il est recommandé l'usage massif et soit in loco soit IV parce que son absorption digestive n'est pas vraiment ce qu'on qualifierait de meilleure. On comprend déjà que la biodisponibilité sera réduite or la concentration minimale active (CMA) est élevée.🤷🏽‍♂️
L'aspergillome d'indication chirurgicale se soigne comme une tumeur à malignité mitigée, faisons attention ! Un traitement en sandwich (comme se soiviendraient nombreux d'entre nous du traitement en chirurgie oncologique): antifongique-chirurgie-antifongique👌🏾

Kaba Forum Online a dit…

❓Sam Ntedika,
Le BK aussi, à ce que je sache, infecte en inhalant l'air contaminé... Mais quand ça donne les différentes formes de TBC extrapulmonaires (avec comme caractéristique anapath pour chacune, la présence de nécrose caséeuse y compris la TBC pulmonaire elle-même) mais, j'aimerais savoir si l'aspergillome ne se forme qu'au niveau des lésions tuberculeuses de localisation pulmonaire. Si oui, pourquoi ?

🔁 Exaucée Nebula
Le germe se trouve dans l’air, par inhalation des spores et vu que l’arbre aérien communique avec la cavité (caverne), il se fait la germination des spores au niveau pulmonaire contrairement aux tuberculose extrapulmonaires qui, elles, ne sont pas surinfectées du fait que l'aspergillus ne s'y dépose pas. Et quand bien même, il s'y déposerait, comment vivre en absence de l'air ?

🔁Kevy Evan Nguya
Jusqu'à preuve du contraire, elle a raison, Sam (du moins pour l'évolutivité) pas pour l'infectivité.
Autant que la TB, l'aspergillose peut se greffer partout (forme invasive). Le mécanisme est le même.
Elle peut aussi évoluer.
Mais la préférence respiratoire reste justifiée jusqu'à présent par les conditions favorables du milieu pour les spores.

⁉️Sam Kandulu
Docteur Nebula, j'ai quelques préoccupations :
1) Tu dis que la PEC est fonction du terrain, peux-tu expliciter?

2) Quelles sont les maladies auxquelles on pourrait confondre l'aspergilose et comment les exclure en clinique comme en paraclinique ?

🔁Exaucée Nebula
Je disais que le traitement consisterait aussi à traiter la maladie sous-jacente ...

Diagnostic différentiel: asthme, mucoviscidose, bronchectasie, nombreuses maladies pulmonaires.
Les examens paracliniques aideront à exclure d’autres pathologies.

🔁Kevy Evan Nguya
J'ajouterais aussi le cancer bronchique... L'hémoptysie est présente aussi en clinique